Pour découvrir Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord

Charles-Maurice de Talleyrand-Périgord

I. Talleyrand fut un homme d’exception, hyper doué. Il fut un diplomate hors pair. Il a brillé au congrès de Vienne, mais n’a pas gagné. On pourra discuter ses mérites et succès de ministre. Il fut l’agent de Napoléon, de Louis 18 qu’il ne domina pas, qui restèrent les maîtres de la diplomatie. En revanche, il a un incontestable titre de gloire – je dis bien gloire – : on lui doit la création de la Belgique. Il a su mettre un terme à 1000 ans de conflit avec l’Angleterre. Extraordinaire.

Il est impossible de résumer la carrière révolutionnaire de cet homme pétri d’Ancien régime. Sieyès et Talleyrand ont fait la révolution. Ils ont posé les bases : l’Assemblée nationale + la confiscation des biens du clergé. Son œuvre est immense. Il serait vain de vouloir la résumer. Je me contenterai de livrer quelques remarques pour éclairer le personnage. Les « frères ennemis » mourront presque en même temps. Ils ont réussi leur sortie. Le Roi se rendit au chevet de Talleyrand ce que « l’étiquette » ne prévoyait pas. Châteaubriand fut veillé par une garde d’élèves de Polytechnique et de Normal Sup’.

II. Talleyrand est un personnage étrange, hors du commun bien sûr. Il a joué un rôle à la hauteur de son intelligence, à égalité de Napoléon Bonaparte. Ils furent chacun à leur manière attirés par l’autre. Cette double fascination ne fut pas sans conséquence, malheureuse. Leurs conversations étaient animées et riches. Napoléon qui n’était pas qu’un rustre, bien loin de là, appréciait la culture de Talleyrand.

Talleyrand est l’homme de toutes les calomnies. Et l’on pourrait tout croire. Mirabeau l’épingla de méchante manière. Mais Mirabeau avait raison. Talleyrand aimait l’argent et les femmes. Qu’aima-t-il de plus ? on ne sait, et c’est tant mieux. Le pouvoir, peut être ? non. Le jeu ! les jeux de cartes, d’argent, d’esprit, l’organisation des militaires et des diplomates.
Son esprit était vif, précis, concis. Ce pourquoi il pouvait discuter avec Napoléon. Il avait le goût des chiffres. C’était un homme méthodique, un gros travailleur, un financier remarquable. Ses travaux le démontrent aisément, que ce soit pour la nationalisation des biens du clergé ou le projet de réforme de la banque de France, ou encore… Il eût aimé être ministre des finances comme son ami l’abbé Louis qui fit une extraordinaire carrière. Bonaparte qui savait jauger et juger les gens, fut prudent, et ne voulut pas. Peut être n’eût-il pas tort ? Car l’appétence de Maurice pour l’argent fut phénoménal : il n’eût ni compétiteur ni prédécesseur ni successeur sur ce terrain là. Il fut unique. On reste médusé devant tant de vénalité. Le mot d’honnêteté avec lui perd son sens. De nos jours, il eût rapidement pris le chemin des geôles et autres prisons. Mais qu’était l’argent pour cet homme au dessus du commun, aristocrate au sens réel du mot, sans snobisme de « petit marquis ». Il venait, lui, de si loin, de trop loin pour être snobé.

III. Il était charmant : c’est ce que disaient de lui nombre de femmes bien sûr, mais d’hommes aussi. Il était bel homme, avec un visage agréable, de beaux cheveux blonds. Dans le jeu de la séduction, auprès des femmes, il n’avait d’égal, peut être, que « l’enchanteur » François René de Châteaubriand, qui lui vouait une animosité, une haine implacables. Le nombre des conquêtes de Talleyrand est impressionnant. Mais ce qui l’est davantage, est que les femmes, même et une fois délaissées ou peu regardées, lui restaient attachées, à défaut d’être encore fidèles sans disputes ni trop de jalousies. Il savait stimuler leur ardeur. Mme de Staël, fille du financier Necker que Talleyrand n’appréciait pas du tout, partit ainsi à la conquête de (vicomte de) Barras, qui fut surpris et étonné, pour obtenir le maroquin des Affaires extérieures. J’allais écrire le « portefeuille », cela aurait été plus convenant lorsqu’on sait à qu’à cette annonce, Talleyrand s’écria « nous allons faire fortune, une fortune immense ». Et encore, pour l’emporter et prendre la place du ministre en titre Charles Delacroix, il prit aussi sa femme, un instant pour en faire sa maîtresse, d’où naquit ( ?) l’illustre peintre Eugène Delacroix.

Entre beaucoup d’autres, et d’autres encore, 4 femmes ont compté. Eugénie de Flahaut, Germaine de Staël, Catherine Gand, la duchesse de Dino. La première à laquelle dans ses mémoires il ne consacra à la fin de sa vie que deux lignes, fut incontestablement son premier grand amour. De leur liaison, naquit Charles qui fut l’amant de Hortense de Beauharnais, d’où naquit Charles de Morny (Demorny) enfant adultérin et demi frère de l’enfant légitime Louis Napoléon, futur Napoléon III. Que d’enfants ! Talleyrand était aussi charmant avec tous ces enfants, avec lesquels il eût des relations agréables et auxquels il manifesta attention, affection et tendresse, et qui le lui rendirent bien. La seconde le fit entrer dans « la carrière ». Les charmes de la troisième pourtant si belle se fanèrent. Elle tomba en disgrâce. Il en divorça et manqua d’élégance à son égard. La duchesse de Dino était quand même l’épouse d’Edmond de Talleyrand-Périgord, neveu de Charles Maurice qui avait arrangé / imposé le mariage de son neveu avec cette belle princesse de Courlande. Belle femme, et encore plus fortunée, elle devint la « compagne » de Talleyrand à partir du Congrès de Vienne.

IV. Cet homme charmant rencontra Bonaparte qui lui aussi ne manquait pas de charme quand il le voulait bien. Ce fut manifestement un jeu de séduction réciproque.

Si Talleyrand se sépara de Napoléon et le trahit, incontestablement Talleyrand fut encore longtemps sous le charme. En apparence du moins. Avec Talleyrand, on ne sait jamais : que pensait-il vraiment ? Les lettres dithyrambiques de Talleyrand à Napoléon créent un écran : leur sincérité est suspecte.

Bonaparte était plus sincère, plus clair. Il a admiré Talleyrand. Il l’a dit maintes fois. Et quand il lui retira ( ?) le ministère, il lui confia des missions extraordinaires. Et après l’avoir rudoyé – ce qui fut une erreur – et l’avoir humilié – ce qui fut une faute -, il sollicita encore et encore ses conseils et lui offrit à nouveau le Ministère. La relation Bonaparte-Talleyrand est claire. Deux personnalités fortes, intelligentes, cultivées, s’affrontent et s’estiment.

La relation Napoléon-Talleyrand est plus ambiguë. Talleyrand n’a pas joué clairement. Napoléon pourtant clairvoyant a été dupé, ce qui est surprenant.

Napoléon a suspecté Talleyrand de duplicité. Il n’a pas vu la trahison, évidente. On est confondu, étonné. Comment ne pouvait-il pas voir alors qu’il savait, comment pouvait-il ignorer alors qu’il avait une police efficace et remarquablement renseignée. Faudrait-il accroire qu’il ne voulait pas voir, ne pas rompre le charme : étrange faiblesse d’un homme intelligent, équilibré. Il s’interrogeait toujours : « mais pourquoi a-t-il voulu quitter le Ministère ? » alors que la thèse officielle est que c’est Napoléon qui l’a chassé.

A suivre

Dominique Fleuriot, Docteur en droit, Avocat au barreau de Valence

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